Interview avec Son Excellence M. Samir Labidi, Ambassadeur de la Tunisie aupr ?s des Nations Unies ? Gen ?ve et Pr ?sident de la Conf ?rence du D ?sarmement

17 février 2008
Interview avec Son Excellence M. Samir Labidi, Ambassadeur de la Tunisie aupr ?s des Nations Unies ? Gen ?ve et Pr ?sident de la Conf ?rence du D ?sarmement

Tunisie, Samir Labidi, Ban Ki-moon, Abdelwaheb Abdallah, Conf ?rence du d ?sarmement

Gen ?ve est certes connue en tant que capitale humanitaire du monde, mais ?galement du d ?sarmement. C’est ? Gen ?ve en 1932 qu’a eu lieu la premi ?re conf ?rence du d ?sarmement.

Depuis lors, Gen ?ve est devenue une plateforme tant de
l’humanitaire que du d ?sarmement, ces deux secteurs ?tant ?troitement li ?s. Nous aimerions mieux conna ?tre les actions organis ?es ?
partir de Gen ?ve dans la sph ?re du d ?sarmement. Qui est mieux plac ? que le Pr ?sident de la Conf ?rence du d ?sarmement, Son Excellence M. Samir Labidi, Ambassadeur de la Tunisie, qui assure la Pr ?sidence de cette Conf ?rence cette ann ?e, soutenue de cinq co-pr ?sidents.

Q : Monsieur l’Ambassadeur, tout d’abord permettez-moi de vous f ?liciter de votre nomination ? la Pr ?sidence de la Conf ?rence. Tout le monde esp ?re que votre Pr ?sidence donne un souffle de renouveau ? la Conf ?rence. Pourriez-vous nous parler de ce que vous ?tes en train de pr ?parer pour cette ann ?e ?

Je voudrais, tout d’abord, exprimer tout l’honneur qui ?choit ? la Tunisie d’acc ?der ? la pr ?sidence de la Conf ?rence du D ?sarmement pour l’ann ?e 2008. Je mesure personnellement hautement cette charge au titre de cette ann ?e qui constitue une ?tape importante des travaux de la Conf ?rence.

La Conf ?rence du d ?sarmement ?tait constitu ?e en 1979 comme instance multilat ?rale unique de la communaut ? internationale pour toutes n ?gociations dans le domaine du d ?sarmement. Elle ?tait issue de la premi ?re session extraordinaire de l’Assembl ?e G ?n ?rale des Nations Unies consacr ?e au d ?sarmement de 1978. Le mandat actuel de la Conf ?rence du d ?sarmement couvre pratiquement tous les
probl ?mes li ?s aux armements et au d ?sarmement ?
l’ ?chelle multi-lat ?rale.

La Conf ?rence compte maintenant 65 Etat membres et une trentaine de pays observateurs. Depuis quelques ann ?es, elle ne conna ?t pas d’ ?volution notable, ce que certains qualifient d’impasse, quand on aborde la situation en termes d’ ?volution de ses travaux pour diff ?rentes raisons aussi objectives que subjectives. En 2007, les travaux de la Conf ?rence ont connu une avance notable et on s’attend ? ce que la Conf ?rence connaisse une ?volution plus int ?ressante au cours de l’ann ?e 2008. Il convient de rappeler que tout progr ?s des travaux de la Conf ?rence se fait de mani ?re consensuelle.

Selon la pratique, la Tunisie a entam ? ses consultations depuis quelques mois avec tous les membres de la Conf ?rence du D ?sarmement. Ces consultations ont ?t ? initi ?es au mois d’octobre dernier ? New York o ? j’avais particip ? aux travaux de la premi ?re Commission de l’Assembl ?e G ?n ?rale des Nations Unies. A l’ ?poque, j’avais commenc ? ? sonder les points de vues des membres de cette Conf ?rence, et, une fois de retour ? Gen ?ve, j’ai continu ? les consultations.

C’est ainsi que la s ?ance d’ouverture de la r ?union pl ?ni ?re de la Conf ?rence, tenue le mercredi 23 janvier 2008, a constitu ? un ?v ?nement de taille, en accueillant deux invit ?s d’honneur Monsieur Ban Ki-moon, Secr ?taire G ?n ?ral des Nations Unies, et Monsieur Abdelwaheb Abdallah, Ministre des Affaires Etrang ?res de la R ?publique Tunisienne. Les deux invit ?s d’honneur ont d ?livr ? des messages refl ?tant la volont ? d’apporter le soutien n ?cessaire ? la Conf ?rence du D ?sarmement et un message politique fort, ? tous les membres, afin de les encourager ? renforcer cet ?lan positif au sein de la Conf ?rence.

Ainsi, la Conf ?rence a enregistr ? avec une ouverture de cette importance une atmosph ?re tr ?s positive traduisant l’esprit de coop ?ration que j’ai relev ? lors de mes consultations. Il y a une vraie
volont ? politique de tous les pays pour discuter et faire ?voluer les choses.

Depuis, nous avons ?uvr ? sur les m ?thodes de travail de la Conf ?rence avec les six co-pr ?sidents (P6). Par ailleurs, les travaux de la Conf ?rence, soutenus dans le cadre de consultations du P6 avec toutes les parties au niveau des ambassadeurs et des experts, sont de nature ? renforcer cet ?lan, et nous esp ?rons aboutir en 2008 ? des r ?sultats positifs.

La vision de la Tunisie des relations internationales est fond ?e, comme l’a soulign ? Son Excellence Monsieur Zine El Abidine Ben Ali, Pr ?sident de la R ?publique Tunisienne, sur l’interd ?pendance entre la paix, la s ?curit ? et le d ?veloppement. Mue par cette vision, la Tunisie a constamment soulign ? le lien existant entre le d ?sarmement et le d ?veloppement en tant que l’un des d ?fis majeurs ? relever par la communaut ? internationale en vue de r ?sorber la pauvret ? et de diriger les efforts vers la r ?alisation des Objectifs du Mill ?naire pour le D ?veloppement.

Q : Si j’ai bien compris ce que vous dites, c’est que les espoirs des gens dans la Conf ?rence de D ?sarmement sont en train de se former petit ? petit ?

Certainement. Cet ?lan a commenc ? en 2006, et il s’est renforc ? en 2007. Maintenant, tous les membres de la Conf ?rence esp ?rent que 2008 soit l’ann ?e de la relance effective. Les pays membres sont attel ?s ? d ?battre inlassablement de toutes les questions li ?es au d ?sarmement qui sont essentiellement : la cessation de la course aux armements nucl ?aires et d ?sarmement nucl ?aire, la pr ?vention de la guerre nucl ?aire, y compris toutes les questions qui y sont li ?es, la pr ?vention d’une course aux armements dans l’espace, les arrangements internationaux efficaces pour garantir les ?tats non dot ?s d’armes nucl ?aires contre l’emploi ou la menace de ces armes, les nouveaux types et syst ?mes d’armes de destruction massive, les armes radiologiques, le programme global de d ?sarmement et la transparence dans le domaine des armements.

La volont ? politique des pays membres de la Conf ?rence, ainsi que l’esprit positif refl ?tent l’int ?r ?t croissant des Etats aux travaux de la Conf ?rence qui se traduit par la programmation du d ?placement ? Gen ?ve de plusieurs dignitaires, dont des ministres des affaires ?trang ?res et de la d ?fense qui s’adresseront ? la Conf ?rence, d ?s les
premi ?res semaines de la CD.

La Tunisie, attach ?e aux valeurs de la paix et de la Charte des Nations Unies et qui entretient des relations d’amiti ? et de coop ?ration avec tous les membres de la CD, ?uvre ? rapprocher les points de vues des diff ?rentes parties pour participer ? l’ ?tablissement des conditions de travail devant nous permettre ? atteindre le consensus pour traiter positivement des questions relevant de la Conf ?rence au b ?n ?fice de la paix, de la stabilit ? et de la s ?curit ? dans le monde.


Q : Quelles sont les choses que vous souhaitez conclure cette ann ?e ?

Je suis optimiste pour 2008 qui, je l’esp ?re, sera une ann ?e d ?terminante pour concr ?tiser l’ ?lan que conna ?t maintenant la Conf ?rence. Nous nous attendons, d’ici de la fin
l’ann ?e, ? un r ?sultat qui renforcera l’ ?lan d ?j ? ?voqu ?. Je crois et je le r ?p ?te, que la volont ? de tous les membres tend vers un m ?me but, faire des travaux de cette ann ?e une base devant assurer, dans la dur ?e, les meilleures conditions de succ ?s de la Conf ?rence.

Les points ? l’ordre du jour constituent une base de travail pour les d ?l ?gations. Ces points seront coordonn ?s par sept ambassadeurs
coordonnateurs repr ?sentant les diff ?rents groupes r ?gionaux pour que le d ?bat soit repr ?sentatif de la situation mondiale dans un cadre structur ?. Ces coordonnateurs sont nomm ?s par le pr ?sident et lui rendent compte de la teneur des travaux de la Conf ?rence au titre de chaque point ? l’ordre du jour.

Q : Un des grands enjeux est l’armement de l’espace. Pensez vous que les Etats vont s’entendre pour r ?soudre ce type de probl ?me ?

Je crois que la Conf ?rence du D ?sarmement, comme je l’ai dit au d ?but, est le seul instrument multilat ?ral de n ?gociations pour les questions de l’armement et d ?sarmement. On s’attend ? ce qu’en 2008 certaines Parties pr ?senteront des initiatives pour d ?battre de du cadre de la pr ?vention d’une course aux armements dans l’espace.

Q : La Conf ?rence du d ?sarmement compte 65 membres, alors que l’ONU en compte 193 Membres. Ne pensez-vous pas que votre initiative est relativement limit ?e ?

Si la Conf ?rence compte 65 Etats, il faut rappeler qu’elle a commenc ? avec une quarantaine de pays membres et qu’il existe aussi des demandes d’adh ?sion de nouveaux Etats. Plusieurs autres pays participent ? titre d’observateurs (31 Etats).

Q : Lorsque l’on parle de la Conf ?rence du d ?sarmement, les gens ont tendance ? penser que rien ne se passe r ?ellement. Est-ce que vous ?tes d’accord ?

Je ne partage pas ce point de vue pour la simple raison que c’est une question aussi complexe que d ?licate dont d ?pend l’avenir de l’humanit ? toute enti ?re. Le seul fait qu’un tel forum existe et qu’il travaille depuis des ann ?es et en soi un acquis tr ?s important. Quant ? dire que rien ne se passe ? la Conf ?rence ne r ?pond pas ? la r ?alit ?. C’est une ?uvre o ? tout le monde est impliqu ? avec s ?rieux, o ? chaque mot compte et chaque proc ?dure fait l’objet de discussions que tout le monde veut
constructive. Mais, il est vrai, comme je l’ai indiqu ?, la complexit ? et le nombre infini des d ?tails peuvent rebuter certains, alors qu’en r ?alit ? ce sont des questions particuli ?rement int ?ressantes.

Q : Souhaitez-vous jouer le r ?le de m ?diateur ?

Le Pr ?sident de la Conf ?rence a l’obligation de trouver le consensus et consulter tout le monde. D’ailleurs, nous avons mis en avant un plan de travail, consistant en consultations avec une large repr ?sentation dans une transparence totale.

Nous avons essay ?, au cours des consultations que j’ai men ?es tant avec les membres de la Conf ?rence qu’avec les coordonnateurs r ?gionaux et avec l’appui de mes coll ?gues du P6. Je suis persuad ? que cette approche encouragera les membres de la Conf ?rence ? perdurer et renforcer cet ?lan positif au sein de la Conf ?rence.

Q : Vous avez l’air tellement passionn ? et j’aimerais savoir quelle est votre motivation ?

C’est vrai ! C’est un sujet tr ?s passionnant et tr ?s important dans les relations internationales. Je crois que, s’il y a un sujet qui suscite beaucoup d’int ?r ?t ? l’ ?chelle internationale, c’est la question du d ?sarmement. La Tunisie, pays de paix, croit qu’elle peut jouer un r ?le sur la sc ?ne internationale et ainsi peut rallier les points de vues sur la cause noble du d ?sarmement. D’ailleurs, je me r ?jouis que les n ?gociations sur l’armement biologique et les mines antipersonnel ont beaucoup avanc ?.

Q : Tout ce qui touche ? l’armement est en g ?n ?ral un domaine masculin, mais j’ai appris qu’il y a de plus en plus de femmes qui commencent ? s’int ?resser au sujet.

Effectivement, le domaine du d ?sarmement int ?resse de plus en plus de femmes. Cette tendance ne peut que me r ?jouir dans la mesure o ? notre pays, membre actif des Nations Unies, est l’un de ceux qui militent pour l’ ?mancipation f ?minine et l’implication de la femme, ? c ?t ? de l’homme, dans tous les secteurs d’activit ?s. C’est le cas en Tunisie, et les chiffres ? cet ?gard sont particuli ?rement ?loquents.

Pour parler de la Conf ?rence du d ?sarmement, c’est un r ?el plaisir de voir les femmes s’impliquer activement pour enrichir les travaux de cette instance. Outre le nombre important d’experts f ?minins,
plusieurs d ?l ?gations sont dirig ?es par des ambassadeurs femmes. D’ailleurs, l’ambassadeur des Etats-Unis, Mme Christina Rocca, est l’un des pr ?sidents de la Conf ?rence de 2008, sans oublier que l’ouverture de la session 2007 a ?t ? ouverte avec succ ?s par l’ambassadeur de l’Afrique du Sud Mme Glaudine Mtshali.

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