Quelle formule pour sauver le Mali de cette tragédie ? Par Roch Alfred KIKI (BENIN)

3 September 2012

Ni les Maliens, ni la Communauté Internationale n’a pas encore trouvé la formule ou la stratégie qu’il faut pour épargner le Mali du pire. Les tentatives des gouvernements formés ; les menaces de la CEDEAO pour rétablir par la force l’ordre constitutionnel dans une nation en bute non seulement à une crise politique mais aussi à une crise idéologique des islamistes du Nord ; le silence de l’Union Africaine et surtout le désintéressement notoire de l’ONU qui, n’est rien d’autre que la manifestation de sa résignation en face de cette situation ne sont guères les réponses à la crise malienne. Des observations et analyses du commun des mortels, c’est le constat fait.

Pour Mémoire :
Le Mali d’aujourd’hui est le fruit d’une grande civilisation avec l’un des plus grands empires du continent qui date du 11ème siècle. Des chantres comme Sundjata Keita ; Mansa Moussa et autres étaient les précurseurs d’idéologies qui ont fait du Mali une grande nation. Les villes comme Tombouctou, Gao et Djenné furent les centres économiques et culturels de cette civilisation au centre de l’islam soudano-malien. En outre, la prospérité de l’empire reposait sur le commerce transsaharien du cuivre, du sel, de l’or et des étoffes. Les caravanes favorisaient également les échanges culturels.

Par ailleurs, il se distingue aussi par une série d’évènements politiques qui méritent d’être rappelés. Après avoir été membre de la prestigieuse Fédération de l’Afrique-Occidentale Française (A-OF) d’alors jusqu’en 1958 et fait partie de l’éphémère Fédération du Mali depuis quelques mois, le Mali, jadis connu sous le nom de Soudan français, proclame son indépendance le 22 septembre 1960.

Le Soudan français connaît une évolution semblable à plusieurs autres pays d’Afrique. Il obtient une autonomie administrative relative en 1956 et se prononce en faveur de l’adhésion à la Communauté française en 1958. Le Soudan français et le Sénégal s’unissent en 1960 au sein de la Fédération du Mali. Lors de la proclamation d’indépendance, le 20 juin 1960, Léopold Sédar Senghor assure la présidence de l’Assemblée fédérale et Modibo Keita exerce la fonction de premier ministre. La récurrence des différends politiques entraîne le retrait rapide du Sénégal de la fédération, laissant seul le Mali qui proclame son indépendance le 22 septembre 1960. Modibo Keita est à la tête du nouveau pays qui rompt avec la France et s’oriente vers le socialisme. Quel scandale pour la France du Général Charles de Gaulle ? Comme ci ce n’était pas assez, deux autres pays qui vont dans cette direction, la Guinée et le Ghana, formeront quelques mois plus tard avec le Mali l’Union des États africains. Keita, le premier Président du nouvel Etat souverain sera renversé par un coup d’État en novembre 1968. Ça ce n’est pas nouveau en Afrique.

De l’accession à l’indépendance en passant par une démocratie chèrement acquise qui pendant des années faisait la fierté des maliens, des gouvernements se sont succédés avec toutes les caractéristiques possibles. Et subitement le 22 mars 2012, la politique d’Amadou Toumani Touré, le président traité de tout a attelé ses lacunes et s’est soldée par un coup d’Etat commandité par le Capitaine Sanogo. C’est le début d’une mésaventure pour le Mali dont les tenants et aboutissant ne sont réellement mesurés ni par les maliens ni par la Communautés Internationale. Ce qui d’ailleurs plonge le Mali dans une incertitude totale et met en relief l’épineux problème de la prévention des conflits en Afrique.

Allons à l’Actualité :
Une compilation d’hommes avertis serait un bon départ pour vous plonger dans les réalités actuelles que le Mali vit. Dommage que nous en soyons là.
En toute vérité : Gouvernement d’ouverture, ambition inassouvie des tripatouilleurs

C’est à leur corps défendant que certains de nos compatriotes assistent à la mise en place du gouvernement d’ouverture. Ils ont voulu enterrer vingt ans de démocratie chèrement acquise pour s’installer au pouvoir parce qu’il y a eu un coup de force. Ils sont aujourd’hui aux abois dès qu’on a fait appel à tous les fils du pays pour une transition apaisée et des élections transparentes et crédibles, parce que le pouvoir ne se gagne plus que par les urnes. Et il en sera toujours ainsi.
L’injure à la bouche, la haine dans le cœur, l’esprit à la violence, ils ont pris la rue, ils ont porté la grogne partout, ils ont crié sous tous les toits, ils ont même tabassé le Président par intérim. Il s’agit de ces hommes et de ces femmes qui ont cru que la violence verbale et le langage des armes pourraient venir à bout des démocrates. Il s’agit de ces tripatouilleurs dont les partis respectifs ne sont point aux premières loges des élections et qui n’ont eu de postes de responsabilité dans ce pays que par le soutien et la bénédiction qu’ils veulent traîner dans la boue. Les postes qu’ils ont occupés au gouvernement (Premier ministre ou ministre) et à l’Assemblée nationale (Président, Vice Président ou simple député) ne furent qu’avec la bénédiction des Présidents Alpha et Att et de la majorité présidentielle. Ces profiteurs invétérés ont voulu porter le maillot du changement qui emporterait les serviteurs et magnifierait les éternels parasites. Pour eux, leur heure a sonné dès lors qu’on pourrait profiter d’un supposé coup d’Etat pour éliminer les prétendants sérieux au motif que durant vingt ans il n’y a pas eu de démocratie au Mali, quand bien même ils n’étaient rien avant cette démocratie qui leur a tout donné. Nous serons très heureux d’entendre un de ces prédateurs se vanter du minimum de poste électif, conseiller municipal s’entend, avant l’avènement de la démocratie, ou du simple poste ministériel acquis avant cette date. N’est pas Alpha Oumar Konaré, Soumana Sako (ministres sous Moussa) ou Att (Chef militaire sous Moussa) qui le veut.

C’est pourquoi nous comprenons que ces hommes et femmes veuillent sauter sur l’opportunité offerte par le Capitaine Sanogo et ses hommes pour se hisser au pouvoir. Mais ce hold-up contre le peuple malien n’aura pas lieu. Des hommes nouveaux existent, au sein des organisations démocratiques (partis politiques et société civile) dans le respect du suffrage accordé par les Maliens, pour former un gouvernement d’envergure nationale, reconquérir le Nord et organiser les élections. Pour que seul le peuple malien choisisse ses représentants, et non qu’ils soient là par l’entremise d’un coup d’Etat, interdit et condamné par notre peuple via le référendum constitutionnel. L’heure des coups d’Etat est révolue, la pensée unique non plus ne reviendra jamais.

Reconquérir le Nord ? Par la grâce d’Allah, la manne de nos ancêtres nous permettra de reconquérir leur terre. Notre engagement, notre détermination et notre foi enveloppés dans un esprit patriotique sont la seule voie pour la victoire. Nous y parviendrons. Le pays est déchiré, il nous faut le confectionner.
Source : Zénith Balé de Maliactu du 25 août 2012.

Formation du nouveau gouvernement : Des combines de Koulouba aux discussions relatives à la création de nouveaux portefeuilles.
Décidément, la formation du nouveau gouvernement suscite toutes sortes de commentaires. Selon certains bords politiques, la nomination de ses membres, exigée par la CEDEAO, n’a pas été faite en toute transparente. Au lieu de chercher à résoudre la crise malienne, certains en profitent plutôt. N’est-ce pas d’ailleurs cela qui, lors de la formation de ce gouvernement, a entraîné les éléments proches du Président Dioncounda Traoré, les fidèles du Premier ministre Cheick Modibo Diarra et les partisans de l’incontournable Capitaine Sanogo au-devant de la scène sociopolitique, mais aussi à « se tailler la part du lion » au sein dudit gouvernement ?

Du coup, cette situation a « donné du poil de la bête » à des groupements politiques et des associations de la société civile. «Quand la nuit est au plus profond, c’est que l’aube n’est pas loin», disent les Chinois. Un adage qui devrait faire revenir le sourire sur tous les visages tendus crispés à propos du sort du Mali. C’est que la crise que vit le Mali va de mal en pis et se complexifiant chaque jour davantage. Pourtant, ce ne sont ni les efforts, ni les idées, ni la volonté qui manquent pour endiguer cette crise. Du reste, la formation de ce gouvernement d’union nationale devrait en être la preuve. Hélas, certains bords politiques (regroupement IBK 2012, URD, MP22, entre autres…) trouvent que la « montagne » de Koulouba a finalement « accouché une souris», c’est-à-dire « une équipe de copains et de copines ». En clair, ces cadres politiques soutiennent que l’unanimité est loin d’être faite au sein de la majorité de tous ceux qui ont fourni des CV (curriculum vitae). Mais est-ce vraiment l’objectif visé par la formation de ce gouvernement ? Peu de gens le pensent en tout cas car au lieu de chercher à faire l’unanimité autour de cette formation gouvernementale, le Premier ministre a plutôt procédé autrement. Loin d’apporter des réponses à diverses questions et permettre de lire un peu mieux sa stratégie, ce gouvernement n’a pas eu non plus le mérite d’éclairer un peu plus les jeux des uns et des autres. Aux yeux des contestataires politiques, ce gouvernement « d’union nationale » dont le Mali a de nos jours le plus besoin va déjà au-devant d’un fiasco. Selon eux, la crise institutionnelle qui prévalait au Mali est en majorité partie de là : un gouvernement Cheick Modibo Diarra I qui, disait-on, était composé « d’amis et de proche parents qui ferment les yeux sur les réalités du pays sous le prétexte de respecter des échéances électorales ». De l’avis d’une partie de la classe politique donc, la mauvaise foi a encore été la chose la mieux partagée lors de la mise en place de ce gouvernement d’union nationale : que ce soit le Président par intérim, le Premier ministre ou les ex-putschistes, chacun voit aujourd’hui « la paille » dans l’œil de son voisin tout en évitant soigneusement de voir « la poutre » dans le sien propre. Déjà, au sein du FDR, du regroupement « IBK Mali 2012 », de l’URD et du MP22 (entre autres) qui assurent qu’il n’y a rien à négocier pour obtenir un portefeuille, les contestations sont telles qu’on n’a pas l’impression de parler du même problème et de proposer le même remède pour un gouvernement d’union nationale. Par conséquent, les démarches à entreprendre sont d’emblée mortes-nées.

Au gouvernement Cheick Modibo I devraient donc succéder des gens considérés comme représentatifs des différents courants politiques et composantes sociales du pays. D’où la question : en quoi ce nouveau gouvernement est-il inclusif ? Selon des informations émanant de la classe politique, son ossature est à l’image du Premier ministre. Et comme pour démontrer qu’il est resté acteur et non spectateur lors de la formation de la nouvelle équipe, le Chef du gouvernement se serait lui-même rendu au siège de l’Office de ORTM pour remettre la liste du nouveau gouvernement.

Certaines sources émanant de la classe politique révèlent qu’entre Koulouba et l’ORTM, ladite liste a subi un changement.
On a finalement l’impression qu’on s’arrange pour que la crise perdure car certains en tireraient des bénéfices substantiels et d’autres en soigneraient leur égo. Sinon, comment comprendre que le Premier ministre, en acheminant la liste du nouveau gouvernement entre le Palais de Koulouba et l’ORTM, parvienne à y apporter un changement ? C’est à n’y rien comprendre.

Par ailleurs, au lieu de chercher à résoudre la crise, certains en profitent tandis que d’autres qui réclament la recherche d’une «solution malienne» tout en mettant un soin méticuleux à éviter le front où ils devraient pourtant pouvoir faire valoir leur intégrité et leur nationalisme. Mais au lieu de cela, ils ont fait autrement. Et pendant tout ce même temps, les populations du Nord souffrent toujours le martyr.
Source : Jean Pierre James du : Le Combat et du Maliactu du 24 août 2012.

Le Mujao recrute 80 jeunes de Golia pour les former à Ansongo
Le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest (Mujao) a recruté ce matin (jeudi, Ndlr) 80 jeunes du village de Golia pour les former à Ansongo, une localité située à 90 kilomètres de Gao, au nord-est vers la frontière nigérienne, ont rapporté des sources locales.
« C’est au bord des véhicules de marque Pic Up qui sont venus à Ansongo à 11 heures (heure locale, Ndlr) en provenance de Golia, qui est un village situé à 35 kilomètres d’Ansogo », ont rapporté des sources de Gao, qui étaient présentes à la foire hebdomadaire d’Ansogo qui a lieu chaque jeudi.

Ces sources ont précisé que « ces 80 hommes sont venus à Ansongo pour être des militaires du Mujao et de façon volontaire. D’ailleurs, ce sont eux qui ont sollicité ce mouvement extrémiste». Par ailleurs, de l’avis d’un observateur averti, « ce recrutement par le Mujao est une manière de marquer son terrain et d’endoctriner les jeunes pour assurer la révèle au cas où il (le Mujao, Ndlr) quitte les lieux ».
Source : Xinhua du Maliactu du 24 août 2012.

Récapitulation par un Regard d’Analyste :
C’est ainsi présenter la situation qui caractérise actuellement le Mali. Le retour à l’ordre constitutionnel évolue timidement avec la problématique de la réunification du pays divisé en deux et dont une grande partie est occupée par des groupes extrémistes comme Bokor Aram ; Anssar Deen ; Alkaida du Maghreb et d’autres qui sont en gestation. Pour le moment ils règnent en roi et violent excellemment bien les principes des droits de l’Homme. La charia et d’autres pratiques sont légions au Nord du Mali. La profanation des muselets et des manuscrits de Tombouctou, véritables trésor de l’humanité constituent des problèmes majeurs auxquels doivent faire face les nouveaux dirigeants du Mali.

Par ailleurs, la guerre au Mali nécessite que les organisations régionales réfléchissent sur la porosité des frontières de nos Etats et que également la Communauté Internationale anticipe sur une éventuelle crise alimentaire qui plane non seulement sur le Mali, un Mali qui s’égare mais aussi sur toute la sous-région ouest-africaine. Ne serait-il par aussi mieux pour les responsables africains de revoir la nature des partenariats et surtout l’implantation des groupes religieux dans nos espaces ?

L’après Lybie constitue un véritable problème que d’autres pays ont du mal à gérer. Les Anssar Deen, il y en a un peu partout même au Bénin. Quel sort est donc réservé aux communautés de ces pays ?

La crise malienne est une crise africaine non par à cause du panafricanisme très poussé de ce pays mais surtout du fait que le Mali occupe une position stratégique dans la sous région. La CEDEAO et la Communauté Internationale doivent donc conjuguer leurs efforts en adoptant pour principe la concertation pour que le Mali soit sauvé.
rochkiki@yahoo.fr