Cherie Blair, Présidente de la fondation Loomba

24 June 2011
Cherie Blair, Présidente de la fondation Loomba

Le 21 décembre 2010, l’Assemblée générale de l’ONU instaurait, à l’initiative de la République Gabonaise, la résolution 65/189 par laquelle elle déclarait officiellement le 23 juin, comme la « journée internationale des veuves ». La Fondation Loomba a été créée au Royaume-Uni en 1997 par Loomba Raj Loomba et son épouse Veena, dans le but de promouvoir les libertés fondamentales et les droits humains des veuves et de leurs enfants, et afin de sensibiliser le monde aux injustices auxquelles elles sont confrontée, partout dans le monde. Cherie Blair, Présidente de la fondation Loomba était aux Nations Unies, en compagnie de Yoko Ono, la veuve de John Lennon, et de Sylvia Bongo, la première dame du Gabon à l’occasion de cette journée.

Question: Votre coopération avec la fondation Loomba date d’un an ? Comment vous est venue cette idée, et comment voyez-vous votre action ?

C.Blair : A partir de 2005, nous avions tenté de promouvoir l’idée d’une journée des Nations Unies pour les veuves. Nous avions besoin pour réussir, d’un partenaire efficace. L’année dernière, Sylvia Bongo, la première dame du Gabon, préoccupée par ce problème, était sur le point d’aller devant le Conseil de sécurité. Il a été convenu de présenter la demande devant l’Assemblée générale. Nous nous sommes retrouvés avec 56 cosignataires et nous nous sommes livrés à une offensive de charme, afin de nous assurer que tel pays voterait en notre faveur ou que tel autre ne s’y opposerait pas. Le projet est finalement passé devant le premier comité, puis devant l’Assemblée générale sans qu’il y ait obstruction.

Q: Vous avez déclaré que ce que vivent les 750 millions de veuves et d’enfants dans le monde d’aujourd’hui, est une catastrophe humanitaire invisible, qui les condamne à la pauvreté, à la dégradation et à l’esclavage. Croyez-vous vraiment qu’une journée internationale de plus, contribuera à aider ces veuves, compte tenu, entre autre, des différences culturelles?

C.Blair: Je crois que c’est un problème qui ne se voit pas parce qu’on n’en parle pas. Si vous regardez les objectifs du millénaire, vous verrez que les veuves ne sont pas mentionnées. Elles ne le sont pas plus au sein des discussions qui se tiennent à l’ONU. Par le passé, les veuves n’ont jamais été considérées comme un groupe particulièrement défavorisé. Cette journée a permis d’obtenir de l’ONU qu’elle accorde une attention particulière aux veuves et aux problèmes auxquels elles sont confrontées. Cela a permis également que le sujet soit au cœur du débat d’aujourd’hui. Quant à votre question sur ce que cette journée permettra de réaliser, il est bien évident que rien ne se passera si elle n’est pas suivie d’action. Il y a cent ans, la journée internationale des femmes ne représentait rien. Elle est devenue une priorité. Elle l’est dans mon pays. Elle est aussi en France. Nous voulons faire en sorte qu’au moins un jour dans l’année, les gens se posent des questions sur la situation de ces veuves, dans leur pays, et à travers le monde. La prise de conscience est toujours importante. Au-delà de la sensibilisation, nous devons passer à l’action. Nous devons agir en partenariat avec le secteur privé, avec les ONG, avec les gouvernements. Il nous faut surtout agir au niveau des lois. De nombreux pays ont déjà des lois qui prônent l’égalité des sexes et les droits des veuves. Mais de nombreux pays n’en ont pas. Ensuite, il s’agit de les mettre en œuvre, de les appliquer! La grande majorité des veuves ne cherche pas la pitié. Les veuves veulent se prendre en charge et prendre en charge leurs enfants. Le problème, c’est que de nombreux pays, qui sont en théorie prêts à les aider, ne le sont pas dans la pratique, leurs coutumes, comme vous le disiez, les en empêchant. Nous devons contester ces coutumes. Nous devons les exposer, de sorte que personne ne puisse les justifier. Peut-être que par le passé ces coutumes étaient une façon de protéger les veuves. Aujourd’hui, plus rien ne justifie de les spolier de leurs biens, de les marier de force. De les empêcher de travailler. Nous sommes au vingt-et-unième siècle. La meilleure façon d’aider ces femmes, c’est de leur donner la possibilité de décider par elles-mêmes.

Q : Pour ces projets, vous avez besoin d’argent. Comment allez-vous vous y prendre ?

C.Blair: Bien sûr que nous avons besoin d’argent. Aujourd’hui, nous parlions aux femmes qui ont perdu leurs maris dans les attentats du 9 septembre 2011. Beaucoup cherchent des façons d’aider les autres veuves. Beaucoup ne sont pas informées de ce qui se passe ailleurs. C’est une parfaite opportunité de les mettre en contact avec d’autres veuves dans le monde, afin qu’elles s’aident mutuellement. Yoko Ono, qui est une veuve si je puis dire, privilégiée, a voulu manifester la sympathie d’une veuve à d’autres veuves. Comme toujours pour intéresser le public, vous devez démontrer que le cas que vous traitez est le meilleur !

Propos recueillis par Célhia de Lavarène