KURAVANE à l’Institut du Monde Arabe
KURAVANE présenté à l’Institut du Monde Arabe est un ballet indien dont la source d’inspiration est comme pour tout l’art du spectacle indien, dit-on, le Mahârabhâta, sorte d’Illiade ou épopée biblique comportant 18 chants.
Huit danseurs et 3 musiciens sublimes, chanteurs aussi, suivent le célèbre chorégraphe et danseur RAGHUNATH MANET pour une parfaite synchronisation, le musicien qui improvise sur sa Veena, instrument à cordes de dimension importante. Les percussions: petit tabla et grand tabla, utilisent le même tempo . Ces instruments s’ils sont différents par la mélodie doivent être au même rythme que sa Veena.
La synchronisation et l’improvisation se retrouvent dans les voix également ; on reconnait des sons d’Asie, l’oreille se tend à des consonances européennes, leitmotiv mélodieux qui devient familier. La musique indienne quant à elle, ravit l’ouïe comme une senteur d’encens dans la pénombre. Le charme de l’Inde éternelle opère, les traits se détendent...La grâce de l’accueil de son public par le danseur agit lorsqu’il offre une fleur de Lotus imaginaire : on est accueilli, on en devine la couleur, on respire son parfum déjà... le spectacle commence.
Le vocabulaire de la nature ou des sentiments sont mimés : une fleur, un papillon fait l’objet d’une expression gestuelle. Puis il suffit que les danseuses petites, grâcieuses, ouvrent leur genou, le pied "flex" à l’indienne et toute la magie de l’Inde devient sonore par le froissement de leur jupe, éventail déployé de soie éternelle. Elles se rangent en bataillon on pense à l’Inde moderne ....mais on est tout de suite repris par le Mâharâbhâta rédigé par le dieu de la sagessse et du succès : Ganesh (le petit dieu éléphant, très gourmand) littéralement le mâhâbharâta signifie " Grande Inde", on comprend alors l’aspect martial parfois de la chorégraphie.
Triomphant Raghunath Manet s’élance comme un oiseau de feu, non pas dans les airs comme le célèbre "oiseau de feu" de Stravinsky mis en scène par Maurice Béjard mais latéralement, Raghunath a cette présence sur toute la scène, emplissant l’atmosphère d’un rayonnement et d’une joie généreuse qu’il distribue à son public. Quand il prend alors la posture du dieu Krishna, il devient réellement un dieu. Le chorégraphe l’a voulu ainsi car l’événement principal du texte est l’apparition de Krishna au 8 ème livre du Mâharâbhâta. La forme actuelle du texte date du Vème. Il relate de hauts faits guerriers qui se seraient déroulés environ 2200 ans avant Jésus Christ. On assiste à l’apparition de dieux durant ces récits ainsi le 8 ème livre (des 18 chapitres) contient le texte l’apparition de Krishna, dieur bienfaisant : lorsqu’un danger menace, il descend sur terre pour rétablir l’ordre sous la forme de l’une des incarnations de Vishnu.
Ces épopées qualifiées d’authentiques parleraient de la guerre que se sont faite deux empires, celui situé en Inde les" RHAMAS" et l’autre cherchant à envahir le territoire les "ASVINS" ; c’est aussi la rivalité de deux familles les PANDAVAS et les KAURAVAS.
Les visages des danseurs n’expriment pas les sentiments des princesses des récits du Mâharâbhâta car Raghunat Manet a préféré plutôt que de s’attacher à des histoires particulières du Mâharâbhâta, nous donner un aperçu panoramique de la célèbre odyssée indienne. Il est avant tout danseur : véritable BEJARD indien, Rhagunath Manet tel un héros de l’Illiade (Illion, nom de la ville de Troie) cherche par la performance sinon l’héroïsme, à acquérir un statut divin. Il y parviendra et l’on se quitte, baigné par la lumière de l’amour du salut final propre aux danseurs étoiles.La diagonale évanescente des petites danseuses disparaîtra, laissant l’amour dans celui qui reste et les dieux reprendront leur place, figés sur les bas-reliefs, pour l’éternité.
VERONIQUE VESVAL décembre 2025.

